Asies au pluriel

Publié le

Excellent article de Philippe Pons dans le Monde d'hier (voir ici).
Le titre dit tout : Asie, une région à l'unité fictive.
J'apprécie beaucoup cette façon de remettre en cause des évidences sémantiques.
Tout le monde parle en effet de l'Asie, comme tout le monde accepte sans moufter que l'Europe s'arrête à l'Oural.

Or, que nous dit-il ?
Que l'Asie n'existe que dans l'imaginaire occidental. Qu'il s'agit d'une représentation, voire d'une construction intellectuelle.
Qu'il y a en fait des Asies :
celle de Chine, celle d'Inde, celle du Japon (il n'est d'ailleurs pas anodin que ce soit le correspondant à Tokyo qui signe cette analyse).
Que la fascination actuelle pour "l'émergence de l'Asie" n'est qu'un nouveau poncif qui ne prend pas en compte la complexité de la zone.
Et que s'il y a unité , c'est dans l'irritation face à l'Occident :"une Europe nombriliste, engluée dans les arcanes de la gestion interne de l'Union, et une Amérique déconsidérée par ses violations du droit international ne constituent plus une référence pour l'Asie tant qu'elles persévèrent dans leur ethnocentrisme. Diatribe anti-occidentale récurrente, certes, mais qui n'en indique pas moins un état d'esprit diffus : divisés entre eux, les Asiatiques sont aussi agacés par ce qu'ils perçoivent comme l'arrogance de l'Ouest "

Bref, l'arrogance n'est plus une qualité (?) française, elle est désormais partagée.

Je partage cette opinion. D'ailleurs, je la suggérai avec le 's' donné à la catégorie de ce billet : "Asie(s) et Océanie".

Mais il me paraît que le discours convenu que l'on entend sans cesse sur l'Asie, "future puissance du XXI° siècle", rappelle furieusement celui d'il y a dix ans sur la mondialisation.
On revient aujourd'hui de la mondialisation, ne trouvez-vous pas ? (voir ici)
Je gage qu'on reviendra sur la dominance asiatique, car encore une fois, on "globalise" des rélités qui sont bien trop diverses pour se contenter de cet amalgame. Et localement, il y a des dispositifs géopolitiques compliqués qui contredisent cette future domination (voir ici).
Sans compter les facteurs intérieurs de fragilité, propres à la Chine, à l'Inde ou au Japon.

Il ne faudrait pas que la distance, la méconnaissance et la vogue nous fasse prendre des vessies pour des lanternes.
Mais ce relativisme ne doit pas pour autant rassurer un Occident qui a, c'est le moins qu'on puisse dire, beaucoup d'efforts à faire....

Olivier Kempf

Publié dans Asie(s) et Océanie

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article