Kossovo et partition

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Le premier ministre serbe, Boris Tadic, a évoqué l’éventualité d’une partition de la province du Kossovo, qui a unilatéralement déclaré son indépendance.

 

1/ Certains disent qu’il s’agit d’une affaire intérieure – montrer à sa population serbe qu’il n’oublie pas le dossier.

D’autres y voient la volonté de trouver une solution dans la volonté actuelle de dialogue avec l’UE et de sortie de la crise.

 

2/ Tout ceci paraît une position « raisonnable », qui sort au bon moment, alors que l’UE se rend compte, à la suite de l’affaire ossète, qu’elle n’avait pas été très avisée de reconnaître le Kossovo et de privilégier le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes sur le vieux principe helsinkien de souveraineté. En effet, la partition permettrait de faire coïncider les deux principes et de sauvegarder les apparences.

 

3/ Surtout, elle permet de remettre l’UE au cœur du dispositif dans une position de négociation : Belgrade résout le cas kossovien, mais l’UE admet en échange que la Serbie rejoigne à marche forcée l’Union.

Cela remettrait pour la première fois l’UE en tête de la course aux élargissements, course qu’elle mène avec l’OTAN depuis la fin de la guerre froide, course qu’elle perd depuis 1995 : depuis en effet, c’est l’alliance qui a toujours pris l’initiative des élargissements, l’UE suivant un peu plus tard. Cette inversion interviendrait (si elle était confirmée) alors que l’Otan a elle-même échoué à Bucarest dans ses velléités d’expansion – on a suffisamment remarqué à quel point les ouvertures à l’Ukraine et à la Géorgie étaient hasardeuses. Même si l'on peut s'interroger sur la pertinence de cette course. Toutefois, nul ne s'aventure à refuser aux pays des Balkans, une fois qu'ils seront stabilisés, d'accéder aux systèmes européens.

 

4/ Cette solution capitaliserait sur la nouvelle situation européenne, où l’on observe une dynamique européo-russe qui se met en place. De ce point de vue, la Serbie joue habilement, car la résolution du Kossovo donnerait à la Russie gain de cause sur ce point, et lui permettrait des ouvertures sur les autres dossiers du moment, le bouclier anti-missile et surtout les négociations FCE : dans ce dernier cas, l’Europe a encore un rôle majeur à jouer, bien plus que dans celui du BAM, plus purement russo-américain. Vu de Serbie, le soutien de Moscou serait enfin offensif et non plus défensif, comme il le fut au cours des années passées. Belgrade bénéficie par ricochet de la nouvelle position russe.

 

5/ Enfin, cette ouverture de Belgrade intervient une semaine avant le vote par l’AG de l’ONU de l’autorisation de porter le dossier du Kossovo devant la CIJ : un vote favorable est attendu, et c’est probablement sa perspective qui autorise M. Tadic a ouvrir le jeu. Car il est possible, voire probable, que la CIJ rende ensuite un jugement favorable à Belgrade. On peut  être généreux quand on a de bonnes cartes.

 

6/ Un seul bémol à ce projet : la partition enracine plus encore la « purification ethnique » qui est le mécanisme recouvert quasi systématiquement par le « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». Au moins ouvre-t-il des perspectives viables. Du moins, pour la Serbie....

 

Au total, c’est donc de la très bonne politique que fait M. Tadic.

 

Olivier Kempf

Publié dans Confins balkaniques

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