Clausewitz (Livre I, chap. 4)

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Ce court chapitre s’intitule « Du danger à la guerre ».

Car, comme me le disait un des mes premiers instructeurs, « la guerre, c’est dangereux ».

 

1/C’est un court chapitre, marqué par son époque. Alors, en effet, le danger attirait les jeunes qui y voyaient le moyen d’accéder à la gloire : qui se préoccupe, aujourd’hui, d’obtenir la gloire des armes ? En 1830, « on aspire à la victoire et aux lauriers ».

Suit une très belle description de la montée au creuset de la bataille : ce n’est pas Fabrice del Dongo arrivant à Waterloo. Ou plutôt, c’est Fabrice qui ne s’arrête pas, comme chez Stendhal, dans le désordre des lignes arrières sans rien comprendre. Clausewitz, lui, nous emmène « gravir la colline où se tient le général », « les impacts de balles commencent à frapper », « et voilà qu’un ami tombe ». ». « Même le plus grave peut être décontenancé », mais il faut avancer, « le plomb tombe comme grêle », « les boulets de canons mugissent de tous côtés ». « Encore un pas », « l’air est rempli de balles qui sifflent », et « la compassion nous emplit à la vue des mutilés, des mourants, notre cœur bat la chamade ».

 

2/La conclusion est double.

« Le néophyte ne traversera pas ces différentes régions du danger sans percevoir que la lumière de l’intellect s’y meut par d’autres moyens » : toujours, l’obsession de CVC pour les atouts de la raison, qui ici s’efface temporairement.

Temporairement, car « il est vrai que l’habitude émousse rapidement ces sensations ». On s’habitue à la guerre et au danger. Cette leçon est oubliée aujourd’hui, où l’on considère la violence comme un scandale anormal. Elle est peut-être un scandale, mais il est normal : dans la norme. On peut donc en prendre l’habitude, si ce scandale continue.

 

3/ « Enthousiasme, stoïcisme, bravoure innée, ambition impérieuse, familiarité ancienne avec le danger, il faut tout cela réuni pour qu’au cœur de cet élément mortel l’action ne soit pas inférieure à ce qui semble ordinaire quand on l’étudie en chambre ».

Cette dernière phrase nous est à coup sûr destinée, nous autres stratèges de chambre. Elle seule motive ce chapitre qui ne serait, autrement, qu’une belle page littéraire sur la guerre.

 

Olivier Kempf

 

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