Le renouveau géopolitique de l’Arctique
1/ L’Arctique était une terre stratégique de la guerre froide, pour une raison nucléaire : dans l’affrontement entre les deux grands, la plus courte distance qui les joignait passait par l’Arctique. On passait donc sous l’Arctique, ou très au-dessus : d’une part avec les sous-marins nucléaires (la principale base russe était en mer Blanche) ; d’autre part avec les missiles balistiques intercontinentaux qui devaient survoler la banquise. L’Otan mit en place tout un système d’écoutes pour encadrer cet affrontement nordique : système NADGE, système SOSUS, etc.
La référence à l’Otan est tout sauf anodine : quatre des cinq puissances arctiques sont otaniennes : Etats-Unis, Canada, Norvège, Danemark, sans même parler de l’Islande qui est péri-arctique. Et certains s’inquiètent de l’utilité de l’Otan ???? Il faudra leur dire, en avril, à Strasbourg !
Toutefois, avec la fin de la compétition bipolaire, on avait un peu oublié toutes ces glaces.
2/ L’Arctique a connu, en 2007 et 2008, une grande renaissance géopolitique, pour plusieurs raisons fondamentales, qui dépassent le symbole du drapeau russe planté sous la banquise :
- l’intérêt renouvelé pour la défense anti-missile
- le nouveau carrefour de routes maritimes que permettrait l’ouverture des passages du nord-ouest et du nord-est, et qui favoriserait les échanges entre la triade économique Europe-Amérique-Asie orientale
- le probable gisement de ressources minières
3/ Ces deux derniers événements sont rendu possibles par le réchauffement climatique. Ce qui fait que certains font mine de le déplorer, mais y sont vivement intéressés.
4/ Cela a déjà des conséquences géopolitiques évidentes. Certaines puissances polaires seront considérées comme colonisatrices : Groenland, Féroé et Spitzberg feront l’objet de toutes les attentions des bons esprits autonomistes, indépendantistes, etc.
5/ De même, le principal des revendications de territoires sous-marins (voir mon billet) tient d’abord au prolongements des îles et presqu’îles sous la calotte glaciaire : Groenland, Spitzberg, dorsale Lomonossov, ...
Carte obtenue sur le site de l'IPEV : http://www.institut-polaire.fr/ipev/galerie/arctique/cartes/carte_arctique
Les ours blancs ont du souci à se faire. Au fait, l’Arctique, étymologiquement pays de l’ours, ne tient pas son nom des braves mammifères qui l’habitent, mais du fait qu’on l’atteint en suivant l’étoile polaire, grâce à la Grande Ourse.
Pourvu qu’on garde le Nord !
O. Kempf