Inde-Pakistan : la suite des attentats

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1/ L'insistance de l'Inde à prouver la responsabilité d'éléments du gouvernement pakistanais dans les attentats de Bombay (voir ici) peut surprendre, au premier abord. Il y a là un choix politique, qui paraît explicable.

2/ L'Inde a probablement vu que M. Zardari avait au départ choisi résolument le parti de l'alliance avec l'Occident, et au-delà la réconciliation avec l'Inde. La traduction géopolitique de cette décision était simple : plus besoin d'un arrière-pays stratégique (l'Afghanistan) pour appuyer la confrontation avec le voisin du sud-est. (voir mon billet ici)

3/ Les partisans du maintien de l'opposition traditionnelle avec l'Inde ont donc logiquement intérêt à attiser les tensions au sud-est, de façon à entretenir le flou du côté de l'Afghanistan et donc à y conserver une influence réelle. Ceux-là sont au premier chef les autonomistes cachemiriens (cette manie que j'ai de franciser tous les noms géographiques....!), ce qui explique le choix du Lashkar-e-Taiba (LeT) comme instrument. Qu'il y ait des appuis locaux du côté de Bombay, que ces appuis soient liés aux grandes organisations criminelles locales (vous voyez, j'admets tout à fait l'importance de la criminalité dans la géopolitique, voir ici), cela paraît largement probable. Mais l'idée, la coordination et l'organisation générale de l'opération nécessitent, probablement encore, des appuis autrement importants, et surtout établis.

4/ Ce qui milite pour désigner l'ISI, ou du moins une partie de ces services secrets pakistanais. Car il est de notoriété publique que l'ISI (ou certaines de ses parties) joue depuis longtemps un double jeu et veut instrumentaliser le conflit afghan, de façon indépendante du pouvoir politique.

5/ D'ailleurs, une des premières décisions de M. Zardiri visait justement à contrôler l'ISI, ce qui a été partiellement fait. Mais non totalement.

6/ Il est donc plausible que les éléments les plus extrémistes de l'ISI soient derrière les attentats de Bombay. Mais cela, tout le monde peut le dire. La vraie question devient donc : pourquoi l'Inde insiste tant pour le prouver ?

7/ Il s'agit non d'affaiblir M. Zardiri ou de rechercher la confrontation, comme on pourrait le penser à première vue : mais de pousser justement le gouvernement pakistanais à poursuivre  dans ses choix initiaux. Et à provoquer une décision américaine, à l'orée de la présidence Obama... Ce qui passe, en fait, par la destruction des éléments les plus radicaux del'ISI. Or, ceux-ci ont probablement tout un tas de dossiers qui font hésiter leurs adversaires.... Mais dans ce grand marchandage, il s'agit justement d'en dire suffisamment pour ne pas tout dire. Ainsi, contrairement aux apparences, l'Inde est probablement en train d'aider M. Zardiri à convaincre ses alliés politiques de poursuivre leur mouvement.

8/ La conclusion ? pour se réconcilier, il faut passer par des crises extrêmement dangereuses et risquées. La voie de la paix frôle de très près celle de la guerre....

O. Kempf

Publié dans Asie(s) et Océanie

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