Sarkozy l'huntingtonien ?

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Tel analyste du Monde évoquait l'autre jour (je n'ai plus la référence, désolé) la politique étrangère de M. Sarkozy en expliquant qu'à la différence de ses prédécesseurs, il n'y avait pas cette fois ci de continuité. Preuve, selon l'auteur, du désir présidentiel de rupture, appliqué à tous les champs de l'action gouvernementale.
Je ne réfute pas cette approche 'politique', mais veux la préciser.

Selon moi en effet, la politique étrangère de M. Sarkozy obéit à un principe et un tempérament.

Le principe : c'est celui de l'unité de l'Occident. (je ne m'attarde pas sur la validité qu'il faut, ou non, accorder à ce mot; voir aussi l'article du Diplo, ici). Il me semble que pour M. Sarkozy, il y a l'Occident et les autres, et que les distinctions entre les deux rives de l'Atlantique ne valent pas face aux problèmes de l'heure. Ceci explique son atlantisme sincère (et non démenti) par opposition au bruxellisme de son premier ministre (voir ici). Ceci explique le renforcement en Afghanistan. Ceci explique son amitié avec Israël. Ceci explique ses bonnes manières avec la Russie. Ceci explique sa relative négligence de l'Europe, même s'il considère que celle-ci est aussi un bon outil de l'Occident : du coup, la PFUE paraît un instrument adéquat pour promouvoir ses idées et mettre en scène son dynamisme.

Le tempérament : il s'agit de l'audace. Derrière ce mot, il y a la volonté de tenter des coups afin de faire "bouger les lignes". Ce n'est pas un simple bluff, c'est aussi la conviction profonde que l'action politique permet de transformer le monde, qui n'est pas la simple résultante de forces indépendantes (économiques, écologiques, sociales, ...) auxquelles l'homme d'Etat réagit. L'homme d'Etat, dans cette perspective, est un acteur qui peut modifier son environnement. Bref, il y a un "politique d'abord" très maurassien chez M. Sarkozy. J'en veux pour preuve (ou pour signe) le pari sur la réintégration de l'OTAN (afin de gagner sur les deux tableaux, à la fois à l'OTAN et à l'UE, voir ici) ; le pari de l'UPM qui veut être le cadre de résolution simultanée de trois difficultés (le différentiel nord-sud, la politique de voisinage de l'UE et le conflit israélo-palestinien) ; dernier exemple, la réconciliation franco-syrienne ou franco-libyenne. A chaque fois, une audace et un pari.

En résumé, il s'agit de bouger les lignes pour conserver la ligne de l'Occident.

C'est une attitude ouvertement huntingtonienne, qui pourrait s'intituler :  "Choc des civilisations il y a : prenons en la mesure !".

Olivier Kempf

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